[COMMUNIQUÉ INTERSYNDICAL]
Le 24/06/2024
English version below
En début d’année, Microsoft ferme discrètement Bethesda France, une société connue pour avoir publié des jeux comme Skyrim ou Fallout 4 sur le marché français. Quatre studios de développement (Arkane Austin, Alpha Dog Games, Roundhouse et Tango Gameworks) sont également fermés sans sommation.
Les profits avant les salarié.es
Ces 200 personnes ont appris leur licenciement par mail au nom d’une vague “redéfinition des priorités en matière de titres et de ressources” selon les mots de Matt Booty, responsable de Xbox Game Studio. Zenimax avait été racheté par Microsoft en 2021, qui le liquide donc en partie moins de trois ans après son acquisition. La stratégie est claire : maximiser les profits pour les actionnaires en réduisant les effectifs, sans considération pour les salarié·es.
“En peine pour nos collègues qui ont reçu la nouvelle si brusquement”
A Arkane Lyon, un autre studio Zenimax, le délégué syndical Printemps écologique nous fait part de l’état de sidération et de colère de ses collègues :
“Nous sommes en peine pour nos collègues qui doivent subir si brusquement cette décision unilatérale. Microsoft nous avait annoncé que ce rachat serait un moyen de nous permettre de continuer nos activités, sans interférence ! Encore jusqu’à l’annonce des fermetures, nous étions témoins d’un très grand soutien de Xbox envers Arkane Austin et un très haut niveau d’éloge à propos de Hi-Fi Rush. Ce changement d’orientation brutal et imprévu nous éloigne de la stratégie qui valorisait la diversité des jeux et la créativité.”
“Au sein du groupe entier, une réelle crainte s’installe : plus personne n’est à l’abri après ce changement de cap. A Arkane, une bonne partie d’entre nous craint que le studio ne voie son budget diminuer, ou même ne soit fermé après le projet en cours. Il est très compliqué de rester motivé dans ces conditions, surtout quand notre travail risque d’être récompensé par des licenciements massifs. Beaucoup redoutent que nos futurs projets soient dictés par des enjeux financiers imposés par Xbox, les rendant beaucoup moins intéressants et uniques.”
Navigation à vue de Microsoft
“Nous doutons fortement de la sincérité, de l'authenticité et de la vision à long terme de la direction de Microsoft. Alors qu'ils investissent des milliards dans l'IA, ils semblent évaluer le succès des jeux uniquement en fonction de leur rentabilité financière, éliminant ceux qui rapportent moins.”
10.500 licenciements en 2023
En 2023, le secteur du jeu vidéo a fait face à une importante vague de concentration économique, avec des rachats majeurs et des milliers de licenciements. En plus de mépriser le bien-être et la créativité des salarié·es du secteur, la politique de Microsoft contribue aux désordres climatiques. Entre 2020 et 2023, l’empreinte carbone de groupe a bondi de 30 %, principalement du fait des investissements de l’entreprise dans le développement de ses infrastructures pour des technologies telles que l’intelligence artificielle. L’entreprise est toujours sourde aux appels à la sobriété et continue dans le techno-solutionnisme le plus total.
Décisions autoritaires du capitalisme boursier
La section syndicale est formelle : “Pour remotiver les travailleurs et travailleuses, il va falloir d’excellentes contreparties en termes de conditions de travail, et des garanties de sécurité de l’emploi à long terme. Les entreprises doivent s’orienter vers une gouvernance plus locale et partagée avec les personnes qui investissent leur temps dans la production.”
Écouter la voix des salarié·es
Les jeux vidéos n’existent que grâce à la créativité des salarié·es du secteur. La technologie seule est impuissante et il faut donc que Microsoft et les autres géants du jeu vidéo se remettent en cause si nous souhaitons réellement vivre dans un monde juste et durable. Dans l’intérêt d’une production culturelle de qualité, respectueuse des travailleurs et travailleuses et du vivant, il est impératif de mettre fin à cette fuite en avant techno-solutionniste et d’écouter les salarié·es, démocratiquement.
Cette tribune a également été publiée sur Mediapart!
[ENGLISH VERSION]
Video games: stop social breakdown!
October 2023: Microsoft buys video game publisher Activision Blizzard King for 69 billion dollars. Three months later, the American giant announced the layoff of 1,900 employees in its video game divisions.
Early 2024, Microsoft discreetly closed Bethesda France - a company known for publishing games such as Skyrim and Fallout 4 on the French market. A few months later, four development studios, comprising a total of over 200 people (Arkane Austin, Alpha Dog Games, Roundhouse, and Tango Gameworks) were also closed without warning.
Profits before employees
200 employees learned of their dismissal by an email from Matt Booty, head of Xbox Game Studios, who cited a vague "redefinition of priorities in terms of titles and resources. Microsoft acquired Zenimax in 2021. Now, less than three years later, they have begun liquidating parts of the group. The strategy is clear: maximize profits for shareholders by reducing the workforce without consideration for employees.
"Saddened for our colleagues who received the news so suddenly"
At Arkane Lyon, another Zenimax studio, the “Printemps écologique” union delegate reports the state of shock and anger of his colleagues:
"We are saddened for our colleagues who have to suffer so abruptly this unilateral decision. Microsoft had told us that this acquisition would be a way to allow us to continue our activities, without interference! Even up until the closures were announced, we were witnessing a very high level of support from Xbox for Arkane Austin and a very high level of praise for Hi-Fi Rush. This abrupt and unexpected change of direction takes us away from the strategy that valued game diversity and creativity."
"Within the entire group, a real fear is setting in: no one is safe anymore after this change of course. At Arkane, a good part of us fears that the studio will see its budget decrease or even be closed after the current project. It is very difficult to stay motivated in these conditions, especially when our work is likely to be rewarded by mass layoffs. Being deprived of one’s livelihood has a tremendous impact on mental health. This will have a long-lasting effect on employee’s morale. Also, many fear that our future projects will be dictated by financial stakes imposed by Xbox, making them much less interesting and unique.”
Microsoft is playing by ear
"We strongly doubt the sincerity, authenticity, and long-term vision of Microsoft's management. While they invest billions in AI, they seem to evaluate the success of games solely based on their financial profitability, weeding out those that make less.”
10,500 redundancies in 2023
In 2023, the video game industry faced a significant wave of economic concentration, with major takeovers and thousands of layoffs. In addition to disregarding the well-being and creativity of employees in the sector, Microsoft's policy contributes to climate disorder. Between 2020 and 2023, the group's carbon footprint jumped by 30%, mainly due to the company's investments in the development of its infrastructure for technologies such as artificial intelligence. The company is still unwilling to listen to calls for sobriety and continues in the most heedless techno-solutionism.
Stock market capitalism-dictated authoritarian decisions
The local union is clear: "To renew workers’ motivation, there will need to be excellent benefits, including safe and comfortable working conditions, as well as guarantees of long-term job security. Also, companies must move towards more local governance, shared with the people who invest their time in production."
Listening to employees
Video games only exist thanks to the creativity of employees in the sector. Technology alone is powerless and Microsoft and the other video game giants must question themselves if we really want to live in a just and sustainable world. In the interest of quality cultural production, respectful of workers and the environment, it is imperative to put an end to this blind faith in technologic solutions and to democratically listen to employees.