Accords d'intéressement "verts" : comment choisir les bons indicateurs

A compter du 1er janvier 2025, les entreprises de 11 à 49 salarié·es en bonne santé financière vont devoir mettre en place un dispositif de participation ou d’intéressement. Issue de la loi partage de la valeur, cette nouvelle obligation vise à mieux rémunérer le travail tout en impliquant davantage les salarié·es à la marche de leurs entreprises.

Pour embarquer des salarié·es pour la plupart inquiets des impacts de leurs entreprises sur la planète et le vivant, les directions mettent le paquet sur la RSE, jusque dans les accords d’intéressement. Contrairement à la participation aux bénéfices, uniquement liée à des objectifs financiers, l’intéressement peut être calculé en partie ou en totalité sur la base d’objectifs extra-financiers de toutes sortes.

Dans les entreprises de plus de 50 salarié·es, ces accords d’intéressement, négociés entre les instances de représentation du personnel (CSE ou délégué syndical) et les directions, sont traditionnellement bâtis sur deux ou trois indicateurs “classiques”, liés au management : augmentations du nombre de clients, taux d’absentéisme, taux de satisfaction client… 

Progressivement, avec la loi PACTE de 2019 et la montée en puissance des services RSE dans les entreprises, une idée a fait son chemin : pourquoi ne pas intégrer des indicateurs environnementaux dans le calcul de l’intéressement des salariés?

Si certains indicateurs peuvent être pertinents pour amorcer des changements structurels dans nos entreprises, d’autres ne font finalement que faire peser des mesures d’austérité budgétaire sur le dos des salariés, sous couvert d’écologie.

On vous fait un rapide tour d’horizon de ces critères : 

Réduction des consommations d’eau, d’électricité, de papier… La politique du petit geste

Parmi les grands classiques de l’intéressement à la sauce RSE, les objectifs de réduction des consommations d’eau, d'électricité ou de papier reviennent souvent dans les accords d’entreprise. Il est essentiel de sélectionner ceux sur lesquels les salarié·es ont des marges de manœuvre en fonction du secteur d’activité de l’entreprise.

Réduire la facture d’électricité dans des bureaux n’est pas tellement dépendant de la volonté des salarié·es mais plutôt de celle de la météo. En revanche, conditionner le versement d’une prime d’intéressement à la baisse des émissions de CO2 dans une société de transport à déjà plus de sens, et encore plus si cet accord d’intéressement est couplé à une politique de formation à l’éco-conduite.

Cependant, ce type de critères font peser le verdissement de l’entreprise sur les épaules des salarié·es : économisez le chauffage, utilisez moins d’eau quand vous vous lavez les mails ou supprimez vos mails, comme dirait l’autre!

Sous couvert d'écologie, cette politique des petits gestes permet surtout aux directions de faire des économies d’énergie, d’eau et de papier, dans un contexte inflationniste ou les entreprises cherchent à maîtriser leurs budgets. Le véritable impact écologique des entreprises est à chercher ailleurs, dans les modèles d’affaires!

Ne nous laissons pas berner par ces vieilles recettes de culpabilisation des salarié·es, d’autant qu’elles ne sont pas nouvelles. En 2012, BNP Paribas, l’un des plus gros investisseurs dans les activités pétro-gazières d’Europe conditionnait une partie du versement de la prime d’intéressement à ses ses salariés à … la réduction de la consommation de papier de de 7 kilos par salarié·e en 2013 à  20 kilos en 2015.

Réduction des émissions de gaz à effets de serre : peut mieux faire!

Les accords d’intéressement dit “verts” intègrent de plus en plus souvent un critère de réduction des émissions de gaz à effets de serre. Chez Orange SA par exemple, le dernier accord d’intéressement fixe un objectif de réduction des émissions de 31% par rapport à 2015, sur les scopes 1 et 2. Chez l’opérateur téléphonique, l’atteinte de cet objectif pèse pour 15% dans le calcul de la prime d'intéressement. 

La plupart des accords excluent du calcul de l’intéressement le scope 3. Ce périmètre, qui englobe les émissions liées à l’aval et à l’amont de la production - extraction de matières premières, transport, utilisation des produits… - représente pourtant la grande majorité de l’empreinte carbone des entreprises.

Le scope 2 quant à lui recoupe les émissions carbone liées aux consommations d’énergie de l’entreprise. S’y attaquer dans le cadre d’un accord d’intéressement permet de fixer des objectifs de sobriété énergétique des entreprises. Mais pour repenser des modèles d’affaires compatibles avec les limites planétaires, il va falloir s’attaquer au scope 3!

 

Simple, basique : les bons vieux critères sociaux

Les accords d’intéressement peuvent aussi être corrélées à des objectifs socio-économiques : emploi de personnes en situation de handicap, de seniors, parité femmes-hommes, taux d’accidents du travail en baisse… 

Ces indicateurs présentent l’intérêt d’être facilement calculables, transparents et de ne pas laisser reposer toute la responsabilité sur les salarié·es. Au contraire, ils engagent plutôt les services de ressources humaines à faire mieux en matière d’inclusivité et de lutte contre les discriminations sur le lieu de travail.

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